CAMUS (Albert). Lettre autographe signée... - Lot 98 - Osenat

Lot 98
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CAMUS (Albert). Lettre autographe signée... - Lot 98 - Osenat
CAMUS (Albert). Lettre autographe signée « Albert Camus » à René Char. [Cabris, d'après le cachet postal], 26 février [1950]. 1 p. 1/2 in-4, enveloppe conservée. « Mon cher René, on vous attendait un peu ces temps-ci, avec les Polge [Urbain et Jeanne Polge, amis intimes de René Char devenus ceux du couple Albert et Francine Camus]. On vous espérait, plutôt. Mais J'AI REÇU AU MOINS LES MATINAUX [recueil poétique de René Char paru en 1950], et je vous en remercie, une fois de plus, fraternellement. Si vous étiez venu, vous auriez pu voir les amandiers du pays se couvrir de fleurs en une seule nuit. Le printemps ici, encore fragile, vous réconcilie avec bien des choses. J'AI BEAUCOUP AIME VOTRE DIALOGUE AVEC BRAQUE. Je comprends votre goût et votre estime pour lui, le peintre et l'homme. SON ŒUVRE NE CESSERA PAS DE GRANDIR, AU MILIEU D'UN VACARME D'EFFONDREMENTS, parce qu'il l'a servie exclusivement et sévèrement. Ce qui n'exclut pas la joie, au contraire. Souvenez-vous de Nietzsche : "le sévère amour de soi"... J'aurais souhaité servir ainsi la mienne. Je veux dire avec cette robustesse d'artisan et cette sérénité. Mais J'AI TROP DONNE A LA VIE QUI PASSE, A LA BETISE DE L'HISTOIRE, AUX CONTRADICTIONS QUE JE N'AI PAS SU EVITER, AUX ETRES PEUT-ETRE... Non, la sérénité n'est pas pour tout de suite. Mais des œuvres comme celles de Braque restent des exemples. J'espère que vous êtes content des Matinaux, que j'ai relu, avec une sorte de confiance, je ne sais pas bien dire, d'espoir plutôt, de certitude que demain sera fait de "cela", à n'en pas douter. Travaillez, veillez sur vous, surtout, dont nous avons besoin. Quelle bonne et profonde chose que de se détacher peu à peu de tout ce et tous ceux qui ne méritent rien et de reconnaître peu à peu à travers les années et les frontières une famille d'esprits. Comme on se sent beaucoup tout d'un coup à être enfin quelques-uns... JE TRAVAILLE AVEUGLEMENT A MON "HOMME REVOLTE". Je ne sais pas où je vais, mais j'en finirai cette année [l'ouvrage paraîtrait en novembre 1951. Après quoi, la liberté d'être et d'exprime... »
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