DELACROIX (Eugène). Lettre autographe signée... - Lot 28 - Osenat

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DELACROIX (Eugène). Lettre autographe signée... - Lot 28 - Osenat
DELACROIX (Eugène). Lettre autographe signée [à Charles Soulier]. S.l., 8 mai 1848. 4 pp. in-8. FORTE LETTRE SUR SON DESARROI APRES LA REVOLUTION DE 1848 : le peintre, qui avait célébré la Révolution de 1830 (La Liberté guidant le peuple), voyait avec angoisse se clore le chapitre de la monarchie libérale, et ne se reconnaissait pas dans les révolutionnaires de 1848. « Cher ami, je ne t'ai pas écrit et ne t'ai pourtant pas oublié. Ta lettre, quand elle est arrivée, m'a mis un peu de beaume dans le sang. NOUS VENIONS D'ASSISTER A UNE TERRIBLE CHAPPE-CHUTE ET J'AI ETE CERTES PENDANT PRES D'UN MOIS COMME SI J'AVAIS REÇU SUR LA TETE UNE MAISON. J'ai pris mon parti à présent. J'AI ENTERRE L'HOMME D'AUTREFOIS AVEC SES ESPERANCES ET SES REVES D'AVENIR, et à présent je passe et repasse avec un certain calme apparent sur le tombeau où j'ai renfermé tout cela comme s'il s'agissait d'un autre. Je vois que tout le monde, suivant la trempe dont il est doué, a subi la même métamorphose, un peu plus tôt ou un peu plus tard, ON S'ACCOUTUME A ETRE RUINE, on assiste à un spectacle fort curieux mais un peu cher. NOUS ALLONS TOUS GROUILLER COMME DES GUEUX QUE NOUS SERONS AUTOUR DE L'AUTEL DE LA PATRIE : mais les principes avant tout. On parle d'une fête dans laquelle nous verrons le bœuf Apis, des chars de triomphe remplis et suivis de 4 ou 500 vierges. Il fallait encore une révolution pour opérer tant de merveilles. Es-tu tranquille pour ta position ? Voilà ce que je voudrais savoir. J'espère que tu as moins d'émotions désagréables dans ta campagne que nous dans notre Babylone. À part quelques tiraillemens, tu dois avoir des moments de distraction dans le spectacle des champs et des arbres qui ne changent jamais. Pour nous, il nous est impossible de perdre un seul instant de vue le présent ni l'avenir. LES JOURNAUX QUE L'ON CRIE TOUTE LA JOURNEE DANS LES RUES, LES CONVERSATIONS EFFAREES DE CHACUN et les fonctions continuelles nous mettent sans cesse en face de la position. QUE NOUS SOMMES VIEUX, ET QUE CELA VA NOUS RENDRE VIEUX ! J'AI VU DES ENTHOUSIASTES ET CEUX-LA ETAIENT JEUNES. Rien ne démontre mieux que les Révolutions la nécessité où sont absolument les vieillards de céder la place à de nouveaux aspirants à la vie. Moi, je suis froid comme un marbre et peut-être finirai-je par être aussi insensible... J'avais fini dans les derniers temps par me perdre presque les yeux à force de lire les journaux. C'était une soif que je ne pouvais éteindre. J'ai pris décidément la résolution de n'en plus lire un seul : les événements se passeront de mon approbation puisqu'ils se passent de ma coopération et qu'on ne m'a pas consulté sur ce qui s'est fait. Adieu, cher ami : enveloppons-nous dans notre manteau si nous en avons un : gardons encore une vieille bouteille pour l'amitié. Tout cela mènera à quelque-chose : dans tous les cas nous nous reverrons toujours avec bonheur. Je t'embrasse donc tendrement en attendant et vous souhaite à tous deux le calme et la patience... » AMI INTIME D'EUGENE DELACROIX, CHARLES SOULIER était fils d'émigré et avait vécu en Angleterre. Il lui donna des leçons d'anglais, lui fit découvrir l'aquarelle anglaise, et contribua à le libérer du carcan de l'enseignement académique français. Eugène Delacroix connut son premier amour en la personne d'Elizabeth Salter, femme de chambre de la soeur de Charles Soulier.
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